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Maurs la Jolie

La Perle du Cantal

[Echos d'antan] - Le raoumas du père Menfouté

Publié le 1 Avril 2025 par Maurs la Jolie in Hier et aujourd'hui

Mon pauvre Monsieur,

Ce petit mot de lettre pour vous dire que depuis votre dernière bisite, j'ai trapé un raoumas que jamais plus. Nuit et jour, sans une minute de grâce, toussi qué toussiras, brama qué bramaras. La Mariannou est sourde comme une taupe ; sans cela, elle risquait pas de fermer l'uel. Pendant quinze jours, j'ai fait un tel tambourinage que tous les rats du planquat ont foutu le camp.

Auparavant c'était un sabat infernal, une danse continue avec quelques gourles de rascalous, quelques oriols qui trainaient dans les coins et recoins. Je suis content, tenez, que, pris de peur les rats soient partis, mais bigrement plus content encore que mon raoumas ait été coupé.
Vous savez pas qui me l'a coupé ? Mais alors coupé net, franc, au premier essayage du remède.
C'est le Bitorou, de St Hilaire, le fameux tuaïre de porcs de la countrade. Entre nous, un homme très entendu pour les bêtes, toutes les maladies. Quand il est passé quelque part, le vétérinaire a pas besoin de venir. Il s'occupe pas de la médecine du monde, mais, à titre d'ami, il m'a donné une recette pour mon raoumas.

"Pauvre Père Menfouté, qu'il me dit en rentrant, c'est votre neboude qui m'envoie prendre vos nouvelles. C'est rien, un raoumas, tant plus vous toussirez, tant plus vous viendrez biel."

Ecoutez, de l'entendre parler ainsi, j'aurais eu un tisou à la main, sur la malice, je lui envoyais à la figure. J'aurais eu tort, que tout de suite après, de la poche de sa belouse il sortit une poulide boutille de vin blanc. "Voila ton remède, qu'il me fit; vin blanc qui pète, de Gaillac. Tu le feras bulir avec dedans deux pierres de sucre, trois coète de cèbes, un plein culier de bresque, deux lardous bien roustits. Quand la poutingue sera rébi, la dabaler en te mettant au lit, la meïtat aujourd'hui, l'autre meïfat demain".

Je l'ai fait comme il me la dit et , mon pauvre monsieur, je suis guéri. J'ai voulu en parler au médeci de Calvinet, que j'avais pris un remède comme ci, comme ça pour me guérir du raoumas. Il m'a dit que c'était très bien, mais que ça aurait pu me tuer comme me guérir, que lui conseillerait pas à personne de se pnter comme un cabrétou pour se guérir d'un raoumas. Je lui ai dit qu'après avoir descendu ce vin blanc j'avais dormi comme une souque. 
Il m'a répondu, qu'il en avait vu un autre qui, après s'être couflé de ce biaï, avait tellement bien dormi, qu'il s'était pas rebillé.
Je vous serre la main d'amitié et sans adieu. MENFOUTÉ

Source : La Croix du Cantal du 18/12/1943
 

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